Le monde Post #Covid_19 : un #Monde en 3,4 ou #5D
Lors des crises, le temps de la réflexion et des analyses devrait être limité et le temps de l’action optimisé. Nombre de responsables politiques à l’échelle internationale ont répété inlassablement… « Nous devons nous débrouiller avec ce que l’on a pour résoudre les problèmes ».
Le monde durant la crise du COVID-19 : un monde de la débrouille !
Le monde durant la crise du COVID-19 a été par excellence le monde de la débrouille…des sacs poubelles transformées en sur-blouses…des salles de sport transformées en hôpitaux…des ateliers de haute couture en ateliers de fabrication des masques, des ateliers de parfums transformés en ateliers de fabrication de gel hydro-alcooliques et des constructeurs de voitures transformés en constructeurs de respirateurs…La Chine, atelier du monde, était en panne…le monde est alors obligé de compter sur lui-même. Il a falluse débrouiller à court terme et compter sur son appareil productif.
Face à un problème donné, on utilise ce que l’on a comme matériaux et comme technologies et on cherche une solution : une « maquette » qui soit la plus aboutie possible. Des erreurs des premières maquettes, permettent de raffiner le processus et de reprendre l’exercice dans sa globalité pour améliorer les solutions. Cela est au cœur de l’apprentissage par la méthode du « Design Thinking » qui s’est imposée durant les deux dernières décennies. Au passage, les adeptes des anciennes écoles de pensée étaient entrain de chercher les responsables et les défaillances au lieu de chercher les solutions. Dans ce contexte de la débrouille une technologie s’est grandement révélée : l’impression 3D.
On effet, à l’aide d’une imprimante 3D et de matériaux sommaires, des jeunes de tous les horizons dans les quatre coins du monde ont pu fabriquer des visières, des masques, des respirateurs, du matériel médical…transformant des casques de plongée de Décathlon en respirateurs, et des objets usuels en outils de premiers secours…la révolution 4.0 a trouvé un excellent moment pour montrer une de ses facettes les spectaculaires.
« En France et en pleine épidémie, Roméo, 14 ans et fan d’imprimantes 3D, a déjà imprimé plus de 200 masques pour le personnel soignant de l’hôpital d’à côté de chez lui. »
Qu’est-ce que l’impression 3D ?
L’impression 3D est une technologie ancienne, qui date des années 1960, mais qui n’a été brevetée que dans les années 80. Elle consiste à reconstituer un objet à l’aide d’une maquette numérique en l’imprimant par couches successives de matières. Il s’agit de la création d’un objet réel à partir d’un fichier numérique 3D.Pour obtenir la pièce finale, l’imprimante 3D dépose et solidifie de la matière couche par couche (fabrication additive).Les matériaux sont d’une grande variété de nos jours : métaux, titan, résine, du pastique…
L’impression 3D est une technologie qui, comme les ordinateurs, a été popularisée à partir de la mise sur le marché dans les années 2000 des premiers modèles pour le grand public. Son évolution a été tributaire des avancées de la modélisation en 3D (pour la création des maquettes et des fichiers). Les premières utilisations spectaculaires ont été réalisées en médecine dès 1999. De nos jours, on recourt à l’impression 3D dans tous les domaines et elle semble offrir des possibilités infinies.
« Dans le département des Yvelines en France, sévèrement touché par le COVID-19 une cinquantaine de « makers » fabriquent des visières de protection aux personnels soignants ! Une initiative « visière solidaire » a été lancée »
Quel est le potentiel de la technologie 3D ?
Le potentiel de cette technologie est au-delà de ce l’on pense. Elle est presque employable dans tous les secteurs industriels. A titre d’exemple, l’impression 3D des pièces de rechange tend à se banaliser (à condition de disposer des maquettes industriels). Dans le domaine de la construction et du bâtiment, cette technologie est apparue comme une évidence. Même si c’est encore au stade de maquettes, la construction de maisons est possible avec des imprimantes 3D et du béton comme matériau. Pour faire face aux catastrophes naturelles, de nombreux projets pensent à l’impression 3D des habitats, en remplacement des tentes de fortunes. Dans le domaine de la création artistique, de nombreux artistes ont commencé à se saisir de cet objet pour réaliser des œuvres. Les orfèvres ont également compris l’intérêt de la fabrication des bijoux à l’aide des imprimantes 3D.
Mais les usages les plus spectaculaires sont sans nul doute dans le domaine médical. De nos jours, les équipes médicales impriment en temps réel des organes sur mesure (trachée du larynx, vertèbre…). Dans la médecine dentaire, elle tend à se généraliser.
« A Brescia, grâce à l’impression 3D, il a été possible de concevoir et d’imprimer en 3D des valves de respirateurs dans la nuit du 14 au 15 mars. La communauté qui avait initiée ce projet composé d’un hôpital, d’un journal, d’une équipe de professionnels, a fait une course contre la montre et a sauvé des vies. »
Un des usages ultimes et le plus spectaculaire de cette technologie est celui de l’exploration spatiale. En effet, l’impression 3D risque d’être la clé des futures explorations spatiales lointaines. Elle permettra, à court terme, aux équipes chinoise, européenne et américaine qui ont programmé l’installation de bases lunaires…de construire sur place à l’aide des matériaux existants principalement du régolithe(roches lunaires). Ceci permettra de dépasser la contrainte d’amener les matériaux nécessaires à la base lunaire à partir de la terre. Il s’agira également de construire les pièces de rechange des fusées localement à l’aide de l’impression 3D.
De quelle manière la technologie 3D sera au cœur du modèle industriel ?
Pour comprendre le changement d’approche et de réflexion initiée à partir de l’épisode COVID-19, l’exemple de ce qui s’est passé à Montréal au Canada est instructif. Face à la pénurie de matériel médical et de masques en particulier, un projet a été mis en place par des équipes scientifiques. Elles ont créées et imprimées du matériel ainsi que des équipements de protection pour pallier les besoins hospitaliers, et ce, jusqu’à ce que les fournisseurs habituels puissent subvenir à la demande. Mais face au succès et la capacité de créer quelque 1000 visières – qui ont été déjà livrées au personnel soignant du CHUM, le projet ambitionne à présent d’industrialiser la production et d’arrimer les besoins en matériel du milieu hospitalier aux infrastructures d’impression 3D existantes.
En effet, l’impression 3D est une technologie puissante qui arrive à maturité et qui est capable d’être utilisée dans les quatre coins du monde. La démocratisation des matières premières et leurs variétés permet aujourd’hui de raccourcir les chaînes de production, de produire (imprimer) à la demande et de limiter le transport international de produits qui pourraient être localement réalisés. Cette entrée spectaculaire de la 3D dans la course industrielle touche même les secteurs les plus à la pointe.
« Des étudiants ont pu mettre en place un lanceur de fusée, imprimé en 3D limitant le nombre de pièces et de soudures de 90%. Le coût de lancement est divisé par 2 ! La NASA est entrée dans le capital de la startup ! »
Aujourd’hui, l’impression des pâtes– grâce à une imprimante 3D développée par la fameuse marque italienne – pourrait bien vous occuper une partie de la soirée. Face au désir des consommateurs de personnaliser leurs produits, compte tenu des impératifs de soutenabilité écologique, l’impression 3D pourrait permettre une révision en profondeur du modèle industriel et faire abandonner le modèle de la production de masse – principalement en Chine.
Une nouvelle politique industrielle autour de ce concept est souhaitable et sera mise en place. Cela permettra aux pays de réviser la liste des biens industriels pour lesquels une production minimale devrait être assurée localement. Mais à la différence des anciens concepts, il n’est nullement besoin de développer une filière spécifique. L’industrie 4.0 est également un concept dans lequel les productions multiples (produire par une même usine plusieurs produits) à l’aide du recours aux technologies 3D est possible. L’impression 3D pourrait permette d’assurer une flexibilité et de répondre à des demandes volatiles et en fonction de contextes différents. Produire à la demande des biens différents. Ce retour des politiques industrielles est,en quelques sortes, une forme de la démondialisation dans le secteur industriel. Aux Etats-Unis, OBAMA, a été parmi les premiers convaincus du pouvoir de cette technologie. Ilavait ordonné l’ouverture de 15 centres de recherche sur l’impression 3D.
Quels sont les préalables ?
Quatre préalables sont nécessaires de notre point de vue. Le premier concerne la culture éducative de l’impression 3D. De nombreux jeunes sont complètement mordus de cette technologie, mais sa généralisation nécessite de la mettre au cœur du modèle éducationnel et dans toutes les écoles. Il est important que l’appropriation soit le plus large possible.Cette intégration est complète dans le modèle d’éducation nordique et dans d’autres pays. L’acquisition des compétences de base de cette technologie devrait être facilité par le système éducatif au même titre que le dessin et les sciences naturelles.
Le second préalable est relatif à la généralisation de l’impression 3D dans les Fablabs et auprès des incubateurs de start-ups ainsi que dans les espaces de création d’entreprises. Pour de nombreux jeunes et créateurs d’entreprises, il est primordial de considérer les possibilités offertes par cette technologie sur leurs futures entreprises et leurs futures solutions. Un certain nombre d’entre eux pourraient changer d’approche, voire de technique de production.
Le troisième préalable concerne la généralisation des démonstrations de l’impression 3D auprès des industriels établis. De nombreux industriels ignorent les possibilités offertes par cette technologie. Une reconsidération de leurs postulats et de leurs approches en cherchant à utiliser tout ou partie des possibilités offertes par l’impression 3D serait bénéfique pour réviser les chaînes de valeur et le modèle d’affaires.
Le quatrième préalable est relatif à la propriété intellectuelle. En effet, le plein usage du potentiel de la 3D nécessite que l’on puisse disposer de maquettes numériques. Or, jusqu’à présent le mouvement a surfé sur le modèle « copy-left » et a toujours esquivé le problème de la propriété intellectuelle des modèles (copy-right). Une industrie qui emploi pleinement les possibilités de l’impression 3D devrait en premier se soucier des maquettes et de l’industrie de la modélisation en 3D.
Enfin, il importe de conduire une réflexion stratégique sur la place qu’occuperait cette technologie dans les futures politiques industrielles. L’après COVID-19 sera accompagné de nombreuses réflexions stratégiques et notamment sur la réindustrialisation. Une part non négligeable sera fondée sur les technologies additives.
Pour conclure !
Pour conclure, durant l’épisode du COVID-19, l’impression 3D a pleinement démontré la carte qu’elle pouvait jouer sur les chaines d’approvisionnement. Elle permet de produire localement au plus près des consommateurs. Elle permet « de répondre de manière optimale aux situations d’urgence » comme le dit Arthur Wheaton (Université Cornell de New York). Toutefois, elle nécessite encore de diminuer substantiellement ses coûts pour arriver à concurrencer les modèles industriels caractérisés par des économies d’échelle et de gamme. Mais l’impression 3D offre cette carte : écologique, économique et socialement responsable…
Une tendance qui s’affirmera dans un monde POST-COVID-19 transformé.
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