Médecin aux HUG et professeur à la Faculté de médecine de l’Université de Genève, Alain Gervaix recueille des bruits respiratoires depuis 2017 pour concevoir ce stéthoscope numérique intelligent, le « pneumoscope ». Alors que le projet avait à l’origine été élaboré pour mieux diagnostiquer la pneumonie, le coronavirus a réorienté ses travaux.

Encore en phase de développement, le stéthoscope électronique fonctionne comme l’application Shazam qui permet de reconnaître un morceau de musique sur la base d’un court enregistrement. L’asthme ne fait pas le même bruit que la bronchiolite, la pneumonie bactérienne ou le Covid-19.

Connecté à un smartphone ou à une tablette, le stéthoscope est ainsi capable grâce à un algorithme d’intelligence artificielle d’identifier la maladie du patient.

Un algorithme développé par l’EPFL

« Nous accumulons de plus en plus de données sur le Covid-19 et sur d’autres maladies, c’est assez long car il nous en faut énormément », explique le Pr Gervaix. Elles s’en vont nourrir l’algorithme DeepBreath développé à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne.

Les premiers résultats indiquent que DeepBreath est capable de détecter le Covid asymptomatique en identifiant les modifications des tissus pulmonaires avant même que le patient ne s’en rende compte, avait communiqué l’EPFL en décembre.

Selon le Pr Gervaix, une étude menée sur plus de 500 patients a montré que ce stéthoscope a une sensibilité de 80% pour le Covid-19, c’est-à-dire que dans huit cas sur dix il est possible de prédire si le patient aura un test PCR positif ou non. Les résultats de ces recherches seront publiés prochainement.

Un multicapteur

« Nous avons énormément progressé, notamment au niveau des micros, très sensibles et qui étaient parfois perturbés par le bruit ambiant », ajoute Alain Gervaix. Cette partie est développée en partenariat avec la Haute école du paysage, d’ingénierie et d’architecture de Genève.

« Le but est de disposer d’une interface facile d’utilisation et, chose capitale, capable d’évaluer la gravité de la maladie », précise le professeur genevois. Ainsi, le pneumoscope comprend également un oxymètre, qui mesure le taux d’oxygénation du sang, et un thermomètre.

L’appareil a donc évolué au fil des mois en un « multicapteur » de plus en plus performant qui combine trois outils en un. Il est actuellement en phase de certification et de dépôt de brevet. Tous les acteurs de la chaîne des soins pourraient à terme s’en servir pour poser un diagnostic, suivre les malades, prédire l’évolution de la maladie ou encore anticiper le meilleur traitement.

ats/ebz