#Télémédecine: le #Cnom demande une évolution de l’avenant n°6 face au #Coronavirus
#Télémédecine: le Cnom appelle à faire évoluer l’avenant n°6 face à l’épidémie de coronavirus
PARIS (TICsanté) – Le président du Conseil national de l’ordre des médecins (Cnom), Patrick Bouet, appelle les partenaires conventionnels à « faire évoluer » l’avenant n°6 à la convention médicale « dans les jours et semaines qui viennent » pour faire face à l’épidémie de coronavirus Sars-CoV-2, a-t-il indiqué à TICsanté le 4 mars.
L’avenant n°6, entré en vigueur le 15 septembre 2018, détaille le montant des rémunérations prévues pour les professionnels de santé et les conditions à respecter pour bénéficier d’un remboursement de droit commun des actes de téléconsultation et de télé-expertise, rappelle-t-on.
« Les partenaires conventionnels doivent se réunir urgemment » pour discuter d’un aménagement du texte, a déclaré le Dr Bouet. « Ils ont la responsabilité de faire évoluer la situation et de permettre d’utiliser au mieux la technologie dans cette phase de tension du système de santé », a-t-il ajouté, précisant avoir relayé cette demande à la Caisse nationale de l’assurance-maladie (Cnam).
Pour rappel, l’avenant n°6 impose comme préalables au remboursement de la téléconsultation par l’assurance maladie que les patients aient été préalablement orientés par leur médecin traitant et qu’ils aient eu une consultation présentielle avec le spécialiste dans les 12 derniers mois, dans un cadre respectant le parcours de soins coordonné.
« J’ai foi dans le sens des responsabilités des partenaires conventionnels. Ils trouveront des solutions dérogatoires qui pourront ensuite porter des évolutions plus générales de l’avenant », a poursuivi le Dr Bouet.
Contactée par TICsanté, la Cnam a assuré qu’elle n’envisage « pas d’assouplissement de l’avenant n°6 dans le cadre du coronavirus » à l’heure actuelle. Interrogée à propos des entreprises proposant des services commerciaux de télémédecine pendant l’épidémie, elle a insisté sur le fait que « les règles restent les mêmes ». « Si elles respectent l’avenant, les téléconsultations sont remboursées. »
« Profiter d’une situation où un système se met en place pour faire face à une épidémie paraît contraire au principe de solidarité », a commenté Patrick Bouet, alors que certaines entreprises multiplient les communications pour mettre en avant leurs services. « Ces plateformes créent des coupe-files dans le système. Le gouvernement devrait mettre en place des procédures qui garantissent l’égalité devant les outils technologiques », a-t-il ajouté.
Un point de vue partagé par l’union régionale des professionnels de santé médecins libéraux d’Auvergne-Rhône-Alpes (URPS AuRa) qui a appelé, par la voix de son président, le Dr Pierre-Jean Ternamian, à « recourir à des outils gratuits de téléconsultation » développés par les groupements de coopération sanitaire (GCS), les URPS et les groupements régionaux d’appui au développement de l’e-santé (Grades).
Le Dr Marcel Garrigou-Grandchamp, chargé du volet télémédecine au sein de l’URPS AuRa, a rappelé le 3 mars à TICsanté que le GCS Sara -dont l’URPS est adhérente- a développé l’application eConsult Sara, un outil de téléconsultation mis à disposition de tous les professionnels de santé de la région gratuitement.
« Compte tenu de la propagation du virus et des mesures de confinement qui se multiplient, la télémédecine peut aider les médecins et les patients. Un médecin placé en confinement peut continuer à travailler, notamment avec les patients chroniques », a-t-il expliqué.
Comme le président du Cnom, il s’est prononcé en faveur de « quelques aménagements législatifs pour faciliter le recours à la téléconsultation et peut-être assouplir temporairement l’avenant n°6 ». « Depuis l’entrée de la télémédecine dans le droit commun, nous lui cherchons des usages. En voilà un, il est peut-être temps de mettre un coup d’accélérateur pour permettre son déploiement », a-t-il observé.
Les plateformes de télémédecine se préparent
Si la propagation du coronavirus Sars-CoV-2 a mis un coup de projecteur sur les solutions commerciales de télémédecine, toutes ne tiennent pas le même discours.
Directeur médical de la société de télémédecine Livi et membre du bureau de l’association Les Entreprises de télémédecine (LET), créée en janvier 2019, le Dr Maxime Cauterman a souhaité « faire la part des choses ».
« Le LET est solidaire de l’offre de soins, nous ferons ce que les pouvoirs publics nous diront de faire et, aujourd’hui, notre objectif est d’aider les patients à comprendre les informations délivrées par les autorités et les professionnels de santé de plus en plus sollicités », a-t-il expliqué le 3 mars à TICsanté.
« Nous ne pensons pas que ce soit le moment de rouvrir les discussions sur un élargissement du périmètre de l’avenant n°6. Il y a un devoir de solidarité à observer et la question du remboursement de la télémédecine ne doit pas être le sujet en pleine crise du coronavirus. »
Il a souligné le fait que les entreprises du LET n’interviendront « qu’à la demande des autorités » et a insisté sur l’importance que tous les acteurs, dont le LET, soient « autour de la table et associés à la gestion de crise pour avoir, tous, le même niveau d’information ».
François Lescure, cofondateur de MédecinDirect et président de l’association LET, a pour sa part estimé que « la télémédecine est une brique essentielle dans la stratégie de confinement ».
C’est dans cette optique que l’éditeur de logiciels pour les professionnels de santé libéraux CompuGroup Medical (CGM) a annoncé le 5 mars dans la matinée qu’il allait proposer gratuitement, à tous les médecins, sa solution de téléconsultation ClickDoc pendant la durée de la crise épidémique.
« Cet outil permettra aux médecins de garder le contact avec leurs patients sans risquer d’être contaminés, ni leur personnel médical ou autres patients dans la salle d’attente. Par ailleurs, si les professionnels sont confinés, ils pourront aussi continuer à consulter en gardant un contact, par l’image, qui est rassurant pour le patient », a détaillé le 5 mars à TICsanté le président de CGM France, Franck Frayer.
« Nous avons choisi de le proposer gratuitement pendant toute la durée de la crise car la télémédecine ne décolle pas franchement en France depuis son entrée dans le droit commun. Le problème ne vient pas de la technologie mais des usages. Le coronavirus nous offre la possibilité de déployer massivement la télémédecine et de permettre aux médecins de la tester », a-t-il observé.
Quelques heures après l’annonce de CGM le 5 mars, Doctolib, leader de la téléconsultation en France, et Consulib, ont également choisi de mettre à disposition gratuitement leur outil de téléconsultation pour répondre à la propagation du virus.
Le secrétaire d’Etat chargé du numérique, Cédric O, a salué sur Twitter la décision de Doctolib, sans pour autant faire référence aux autres entreprises de télémédecine qui ont pris des mesures similaires. La Fédération des éditeurs d’informatique médicale et paramédicale ambulatoire (Feima) a déploré sur le réseau social une « lecture bien sélective » du secrétaire d’Etat. « Depuis quand un ministre de la République se transforme-t-il en VRP d’une entreprise, bafouant ainsi ses droits de réserve et les règles de la concurrence », a-t-elle taclé.
« Prise de conscience » sur l’utilité de la télémédecine
Pour Franck Frayer de CGM Frane, « la crise ne fera pas vendre les solutions de télémédecine car la pratique n’est pas là », mais il espère qu’elle permettra a minima « d’accélérer la prise de conscience de l’utilité de recourir à la télémédecine ».
En revanche, pas question selon lui d’élargir ou d’assouplir le cadre de l’avenant n°6 à la convention médicale. « La crise du coronavirus ne rend pas nécessaire l’assouplissement du cadre réglementaire. Une fois passée, nous ferons nous-mêmes payer à nouveau nos clients pour notre solution ClickDoc. Il faut préserver le périmètre de l’avenant n°6 pour garantir une médecine de qualité », a-t-il martelé.
En un an, un peu plus de 60.000 actes de téléconsultation ont été facturés à la Cnam, alors que l’étude d’impact de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2018 sur le remboursement de droit commun avait tablé sur 500.000 téléconsultations prises en charge en 2019, rappelle-t-on.