L’ e-santé fait beaucoup parler aujourd’hui, et suscite de nombreuses inquiétudes : ne va-t-elle pas « ubériser » le monde de la santé ? Par ce mot à la mode, on entend souvent : « précariser », « fragiliser », « transformer dangereusement » les métiers en place.
Mais comme souvent avec les mots à la mode, ils traduisent un manque de compréhension et de précision des enjeux.
En 2014, Apple intégrait à son logiciel pour smartphone l’application « Santé », recueillant les données santé du propriétaire du téléphone.
En juin 2016, Google inaugurait une recherche de réponses santé par symptômes, via un algorithme orientant les utilisateurs vers de l’automédication.
L’intelligence artificielle d’un Watson ou d’un Google Deep Mind ne finira-t-elle pas par remplacer le médecin ?
Les outils digitaux de consultation santé ne vont-ils pas fournir diagnostics, ordonnances et traitements aux patients, sans intermédiaire relationnel humain ?
De fait, l’explosion des NATU (Netflix, Airbnb, Tesla, Uber) a introduit un nouveau modèle dans un nombre croissance de secteurs économiques, qui fragilise les métiers existants perturbe des modèles de consommation, et pose encore des questions quant à son adaptabilité à la législation française. La santé n’y échappera pas.
Un service supplémentaire, sans remplacer le médecin
Pourtant, comme souvent avec les expressions à la mode, la notion d’ubérisation ne rend pas compte des évolutions à venir. En effet, elle sous-entend le remplacement des métiers traditionnels sur une tâche dédiée ; or la e-santé ne va pas remplacer le médecin, mais rajouter un service supplémentaire là où il n’intervient pas, mais surtout l’accompagner davantage là où il intervient.
Le digital peut permettre d’amener les médecins dans des zones géographiques ou ils ne sont pas.
En 2015 l’observatoire Jalma estimait que deux Français sur trois renoncent aux soins à cause du temps d’attente pour obtenir un rendez-vous avec chez un médecin spécialiste. L’utilisation des technologies devrait participer à la résolution de cette difficile question des déserts médicaux dans certaines zones, en permettant de mieux répartir l’offre sur le territoire.
De même, des dispositifs de téléconseil ou de téléconsultations devraient permettre de mieux valoriser la mission aujourd’hui réalisée par les médecins, de prévention, de conseil en dehors des consultations, de suivi régulier.
Le smartphone rend le parcours de soin plus rapide
En conséquence, le smartphone ne remplace pas le médecin : il le réintroduit dans les habitudes des utilisateurs. Lors des discussions préliminaires à la création de MesDocteurs.com, Chloé Ramade et moi-même avons pensé et développé cette plateforme comme un nouveau maillon dans le parcours de soin.
Le développement de l’e-santé doit, in fine, rendre le parcours de soin plus rapide, plus accessible, et centré sur la relation médecin-patient, au lieu de lui nuire ou la supprimer.
Digitaliser la première approche du parcours de soin, faire appel à un médecin via une plateforme, lui poser directement une question, et personnaliser le suivi grâce à la collecte sécurisée de données : c’est dans ce schéma coopératif de long terme que la e-santé s’inscrit.