Pr Bernard Debré – Le rôle des pharmacies en France
Une certaine tendance est en train de voir le jour, celle de transférer la vente des médicaments dans les grandes surfaces.
Bien entendu, les pharmacies s’y opposent et les grandes surfaces le réclament. Il faut faire très attention dans le domaine du médicament et personne n’imaginera que je sois à la remorque de quelque laboratoire que ce soit en disant cela.
Le médicament est un produit différent de tous les autres. On ne pourrait imaginer vendre des antibiotiques, des tonicardiaques dans une grande surface et ceci pour deux raisons.
Souvent, le pharmacien est là pour conseiller le patient dans sa prise de médicament, la date, l’heure, la façon de le prendre.
De plus, combien de fois le pharmacien téléphone au médecin prescripteur car il lui semble (parfois à juste titre) que les médicaments sont antagonistes avec ceux que le patient prend déjà, prescrits peut-être par un autre médecin, que les doses prescrites par un médecin ne sont pas les bonnes, qu’il faut peut-être les diminuer ou les augmenter, voire tout simplement pour demander une explication car le médecin peut mal écrire (bien que maintenant presque toutes les ordonnances sont dactylographiées).
Il n’empêche que les malades trouvent chez leur pharmacien un conseil, parfois même un réconfort, peut-être même un prescripteur pour certains médicaments non remboursés, une partie des OTC (over the counter), ces médicaments vendus sans ordonnance, mais qui peuvent avoir des effets en eux-mêmes ou en association.
Je suis donc très opposé à ce que les grandes surfaces vendent les médicaments. Il y a dans l’esprit de certains l’idée que les médicaments pourraient être vendus moins cher. J’ai été parmi les premiers à considérer que les médicaments étaient vendus trop cher, qu’il y en avait trop, que certains étaient inutiles voire dangereux, mais je serai très intransigeant sur leur délivrance.
Vient maintenant sur le tapis la possibilité de vendre les tests de grossesse en grande surface et voir leur prix baisser. Peut-être que pour 90% des femmes qui viendront acheter ce test avec l’espoir d’être enceinte, cette vente en grande surface ne présentera pas de risque. Mais pensons à ces femmes qui veulent connaître leur état avec angoisse, ne souhaitent pas être enceintes pour diverses raisons. Le conseil du pharmacien est alors très primordial. Celui-ci peut lui conseiller la pilule du lendemain, un gynécologue.
Il faut donc faire très attention à cette vente en dehors des pharmacies. J’y suis opposé.
Professeur Bernard Debré