#SantéConnectée : l’émergence des craintes et surtout des espoirs
La santé connectée suscite des craintes et celles-ci sont légitimes.
Elles sont légitimes pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, tout changement implique nécessairement une phase d’adaptation. (cf courbe du deuil ci-contre).
Mais la crainte ne doit pas non plus tétaniser les foules au point de passer à côté d’un progrès dans lequel nous possédons une avance technologique importante et une position nous permettant de nous imposer.
Ces craintes sont liées à la méconnaissance d’un contexte global précis et complexe, ou une connaissance parcellaire, des réflexions analogiques inappropriées.
La puissance de calcul et les capacités de stockage que nécessitera la convergence des flux de données émanant d’un patient acteur de santé vers le professionnel de santé (qu’il soit médecin, pharmacien ou paramédical) ne pourront se faire que de manière externalisée au cabinet. En effet, un ordinateur personnel, bien qu’infiniment plus puissant de nos jours que toute l’informatique de la NASA ayant servi à envoyer des hommes sur la Lune, ne possède ni la vocation, ni l’architecture nécessaire (cluster etc…), ni l’intérêt pour ce type d’opérations (commercial principalement).
Le contexte juridique en France à ce propos est extrêmement soucieux de préserver les droits des patients et professionnels ainsi que leur sécurité.
La loi définit un cadre dans l’article L. 1111-8 du code de la santé publique (loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des patients) garantissant une sécurité physique, informatique et un traitement des données dans un contexte de respect du secret professionnel et médical, pour faire simple. Ce texte de loi s’impose à tout hébergeur prétendant héberger des données de santé à caractère personnel en France et il est de la responsabilité de l’utilisateur de vérifier l’habilitation de l’hébergeur à disposer de ce type de services. La liste des prestataires est disponible sur esante.gouv.fr.
Une autre crainte vient du volume de données à traiter, des conséquences en terme d’une éventuelle surcharge de responsabilité pour le professionnel de santé et de travail sur des horaires.
« IMAGINEZ SI LE CAPTEUR DE MME MICHU SE MET À M’ENVOYER DES INFORMATIONS À 3H DU MATIN POUR M’AVERTIR D’UN IDM ».
Dans une santé connectée au service du patient et du praticien libéral, disons-le tout net, les choses ne peuvent pas se passer de la de la sorte, au risque pour le « système » d’être mort-né. De plus rappelons-le, comment serait facturé par le professionnel ce service supplémentaire ?
Non, la santé connectée doit se mettre au service du patient et donc prioritairement le responsabiliser.
Il devient, au même titre qu’avec le DMP, titulaire de son dossier médical. Ou plutôt, il redevient propriétaire de ses données médicales. Il détient le sesame (si je ne m’abuse, c’est de là que vient la dénomination de carte sesam vitale…) qui ouvre l’accès à ses données de santé. Et c’est lui qui de son propre chef doit prendre rendez-vous chez son professionnel de santé (liberté de choix et interdiction de la publicité entre autres arguments…)
Ainsi donc la « bonne » santé connectée avertit en premier lieu le patient. Et là tous les moyens sont bons pour lui signaler que des variables et constantes issues de son corps s’affolent (mais sans l’affoler lui-même) avec une petite pop-up, un petit mail, un petit SMS, l’invitant à prendre contact et RDV avec son médecin, sans bien sûr annoncer quoique ce soit, puisque rappelons-le, à ce stade aucun professionnel de santé n’a validé de son expertise les hypothèses prédictives et, que même en cas de certitude, c’est le professionnel de santé seul qui saura faire « l’annonce » avec empathie et une approche personnalisée.
Dès lors, le patient prend rendez-vous chez son médecin traitant. A ce stade, le médecin n’a aucune idée de ce qu’il se passe pour son patient, et c’est tant mieux, car de ce fait il n’y a pas de transfert de responsabilité qu’il convient de retarder jusqu’à l’extrême.
En effet, dès que le praticien aura l’information, il sera responsable, auparavant la responsabilité repose sur les épaules du patient.
Il convient donc que le médecin n’ait l’information que lorsqu’il peut agir et exercer son expertise, à savoir en rendez-vous.
Et c’est précisément lorsque le professionnel de santé ouvrira le dossier à l’arrivée en consultation du patient que son outil de santé connectée lui proposera les différentes probabilités issues des analyses de données car sans un traitement automatisé de la donnée dans une optique de SMART DATA, il est même inutile de penser à la santé connectée.
Le célèbre urologue Laurent Alexandre le disait dans une conférence à Montpellier en janvier 2015, un ordinateur peut absorber en moins de 3 minutes ce qu’une vie ne suffirait pas à un chirurgien en matière de connaissances.
Le médecin n’aura dès lors plus qu’à exercer son art de manière facilitée, éliminant des pistes et en pouvant se focaliser uniquement sur les hypothèses les plus probables par des examens approfondis.
Rappelons également que les données issues de ces appareillages professionnels s’intègreront également dans le dossier de manière à venir compléter la base de données afin d’affiner encore la pertinence de l’aide informatique lui laissant toute son attention et son temps pour écouter, voir, regarder, « sentir » et échanger avec son patient dans une relation plus humaine ou l’informatique bien qu’omniprésente se ferait la plus invisible possible.