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#Canicules et #Apnées du #Sommeil : comment la #Chaleur aggrave le #SAHOS

Les vagues de chaleur, de plus en plus fréquentes et intenses avec le changement climatique, affectent non seulement la santé cardiovasculaire et respiratoire en journée, mais elles ont aussi des répercussions nocturnes importantes. Une étude récente publiée dans European Respiratory Journal, portant sur les données de sommeil de plus de 67 000 Européens sur cinq étés, met en évidence une augmentation significative de la prévalence et de la sévérité du syndrome d’apnées–hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) lors des canicules. Voici un exposé détaillé des mécanismes impliqués, des conséquences cliniques et des mesures pratiques pour limiter l’impact de la chaleur sur le SAHOS.

Qu’est-ce que le SAHOS ? Le SAHOS se caractérise par des épisodes répétés d’obstruction partielle ou complète des voies aériennes supérieures pendant le sommeil, provoquant apnées (arrêts respiratoires) et hypopnées (réductions du flux respiratoire). Ces épisodes engendrent des micro-réveils fréquents, une fragmentation du sommeil, une somnolence diurne excessive et un risque accru de complications cardiovasculaires, métaboliques (diabète de type 2), accidents et diminution de la qualité de vie. Le traitement de référence pour les formes modérées à sévères reste la ventilation en pression positive continue (PPC ou CPAP), mais d’autres options existent (orthèses d’avancée mandibulaire, chirurgie, perte de poids, positionnement, traitements pharmacologiques expérimentaux).

Preuve épidémiologique : que montre l’étude ? Les chercheurs australiens ont analysé des enregistrements de sommeil et des données météorologiques pour plus de 67 000 participants européens sur cinq étés. Deux conclusions majeures :

  • Pendant les vagues de chaleur, le risque de SAHOS modéré à sévère augmentait en moyenne de 13 %.
  • Pour chaque augmentation de 1 °C de la température nocturne durant une canicule, la prévalence du SAHOS augmentait de 1,1 %, avec un effet amplifié par une humidité élevée.

Ces chiffres suggèrent une relation dose–réponse entre chaleur nocturne et aggravation du SAHOS, cohérente sur un grand échantillon et plusieurs saisons.

Mécanismes physiopathologiques plausibles Plusieurs facteurs physiologiques et comportementaux peuvent expliquer cette association :

  1. Perturbation du sommeil et fragmentation
  • La chaleur nocturne réduit la qualité du sommeil : elle diminue la durée du sommeil profond et augmente les éveils et micro-réveils. Un sommeil plus léger rend les voies aériennes plus susceptibles de s’effondrer : la tonicité des muscles pharyngés qui maintiennent l’ouverture des voies aériennes diminue durant les stades de sommeil léger, favorisant l’obstruction.
  1. Rétention hydrique et redistribution des fluides
  • La chaleur peut modifier l’équilibre hydrique et conduire à une rétention d’eau périphérique. En position couchée, du liquide peut se redistribuer vers le cou et les tissus péri-pharyngés, augmentant leur volume et la résistance des voies aériennes supérieures, favorisant ainsi les apnées. Ce mécanisme est documenté dans d’autres contextes (sédentarité, insuffisance cardiaque) et paraît pertinent ici.
  1. Déshydratation et viscosité des sécrétions
  • La déshydratation légère à modérée, fréquente lors de fortes chaleurs, augmente la viscosité des sécrétions nasales et pharyngées et peut altérer la mécanique ventilatoire locale, augmentant la résistance au flux d’air.
  1. Réduction de l’usage des appareils CPAP
  • La CPAP, souvent perçue comme désagréable, peut être moins utilisée pendant les nuits chaudes (inconfort thermique, sensations d’étouffement sous le masque, transpiration). L’arrêt ou la diminution d’usage de la CPAP expose automatiquement à un retour des épisodes d’apnée.
  1. Effets de l’humidité
  • L’humidité élevée complique l’évaporation de la sueur, augmente l’inconfort thermique et peut amplifier la dégradation du sommeil et la déshydratation, contribuant aux mécanismes précédents.
  1. Facteurs comportementaux et environnementaux
  • Ouverture des fenêtres la nuit, utilisation ou non de climatiseurs ou ventilateurs, qualité de l’isolation et des matériaux (qui emmagasinent la chaleur) influent sur la température corporelle et la micro-environnement du lit. Les comportements (consommation d’alcool, horaires de coucher) peuvent aussi changer pendant les vagues de chaleur, impactant le SAHOS.

Conséquences cliniques et de santé publique

  • Augmentation de la somnolence diurne, des risques d’accident de la route et professionnels.
  • Majorations du risque cardiovasculaire à moyen/long terme si les épisodes d’apnée sont plus fréquents et prolongés.
  • Inégalités sociales : les personnes sans accès à climatisation ou logements bien isolés, les personnes âgées et celles ayant des comorbidités (insuffisance cardiaque, obésité) sont particulièrement vulnérables.
  • Implication pour la gestion des maladies chroniques : le SAHOS devrait être inclus dans les listes de pathologies aggravées par le changement climatique, avec des plans d’adaptation.

Conseils pratiques pour limiter l’impact des canicules sur le SAHOS Conseils généraux nocturnes

  • Maintenir la chambre fraîche : fermer volets/stores durant la journée, ventiler tôt le matin ou tard le soir, utiliser climatiseur si disponible. Température idéale ~16–19 °C pour favoriser le sommeil (ajuster selon confort personnel).
  • Ventilateur : utile pour convection et sensation de fraîcheur, mais attention au séchage des muqueuses ; coupler avec hydratation.
  • Literie adaptée : draps respirants en fibres naturelles, oreillers et matelas respirants. Eviter couettes lourdes la nuit.
  • Douche tiède juste avant le coucher pour abaisser la température corporelle (éviter eau trop froide qui peut être stimulant).
  • Hydratation régulière en journée et en soirée (sans excès tardif pour limiter la nycturie), boissons isotoniques si forte sudation.

Conseils spécifiques aux patients avec PPC/CPAP

  • Maintenir l’utilisation de la CPAP pendant les canicules : la reprise de l’appareil réduit immédiatement les apnées. Quelques astuces :
    • Utiliser les masques légers et bien ventilés, essayer différents modèles (nasal, narinaire) pour meilleur confort thermique.
    • Humidificateur intégré : régler le niveau d’humidification pour éviter l’air trop sec sans créer de condensation ; pendant fortes chaleurs et humidité, réduire légèrement l’humidification.
    • Positionner le ventilateur ou climatisation pour rafraîchir la chambre sans diriger l’air directement sur le masque.
    • Nettoyage fréquent du masque et des embouts pour réduire l’inconfort lié à la transpiration et aux sécrétions.
    • Si la CPAP est vraiment intolérable, contacter son médecin ou le service du sommeil pour ajuster l’appareillage, tester une autre interface ou envisager une orthèse d’avancée mandibulaire temporaire.

Gestion des médicaments et comorbidités

  • Eviter l’alcool et les sédatifs le soir : ils aggravent la relaxation des muscles pharyngés et la sévérité du SAHOS, effet amplifié par la fatigue due à la chaleur.
  • Contrôler l’hypertension, la glycémie et autres comorbidités qui peuvent interagir avec la sévérité du SAHOS.
  • Pour les patients ayant une insuffisance cardiaque ou œdèmes périphériques, un suivi médical peut aider à réduire la rétention hydrique (diurétiques, ajustement des traitements) pendant les vagues de chaleur.

Mesures à l’échelle des systèmes de santé et recommandations politiques

  • Inclusion du SAHOS dans les plans d’action liés aux canicules : campagnes d’information ciblées pour les patients traités par CPAP, points d’accès pour maintenance et prêts d’équipements dans les centres de santé.
  • Améliorer l’accès à des solutions de refroidissement sûres (climatisation, centres frais) pour les populations vulnérables.
  • Encourager la recherche sur l’interaction entre chaleur, humidité et troubles respiratoires nocturnes, et l’évaluation d’interventions pratiques (p. ex. mises au point d’interfaces CPAP plus ventilées).
  • Former les professionnels de santé à anticiper l’aggravation saisonnière du SAHOS et à adapter les prises en charge.

Points de vigilance et questions ouvertes

  • Variabilité individuelle : tous les patients ne sont pas également affectés ; l’âge, l’IMC, la sévérité initiale du SAHOS, la présence d’œdèmes ou d’insuffisance cardiaque modulent l’impact.
  • Données d’observation : l’étude européenne est robuste par l’échantillon, mais des études interventionnelles contrôlées seraient utiles pour établir des liens causaux et tester des solutions (p. ex. impact d’un refroidissement contrôlé de la chambre sur l’index d’apnée).
  • Interactions climat–pollution : la chaleur s’accompagne parfois de pics de pollution qui peuvent aussi altérer le sommeil et la fonction respiratoire.

Conclusion Les canicules constituent un facteur aggravant du SAHOS par une combinaison de perturbations du sommeil, de modifications hydriques et de comportements (baisse d’utilisation de la CPAP). La reconnaissance de ce lien invite à adapter la prise en charge des patients — conseils pratiques pour maintenir l’usage de la CPAP, stratégies de refroidissement nocturne et attention renforcée aux populations vulnérables — et à intégrer les troubles du sommeil dans les plans d’action face au changement climatique. Pour les patients concernés, la meilleure approche reste la prévention et la continuité du traitement : garder une chambre fraîche, rester hydraté, éviter l’alcool, et contacter son spécialiste si l’intolérance à la CPAP augmente durant les vagues de chaleur.

Références sélectionnées

  • Étude citée : European Respiratory Journal (analyse des données de sommeil — plus de 67 000 participants, 5 étés).
  • Revue sur redistribution des fluides nocturnes et apnée du sommeil.
  • Articles sur la gestion de la CPAP en conditions climatiques chaudes.

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Dr  COUHET Eric
CEO #Apnea #Connected #Center.