#Chirurgie#Robotique : un #Robot évolue seul lors d’une opération à #Coeur battant
A cœur porcin, rien d’impossible : l’hôpital des Enfants de Boston a réussi une opération à cœur battant sur 5 cochons en utilisant un cathéter autonome. Une première dans le secteur de la chirurgie robotique, qui suggère que certains actes chirurgicaux pourraient à terme être réalisés par la main seule du robot.
« A cœur vaillant, rien d’impossible ». Cet adage attribué à Jacques Cœur (financier du roi Charles VII) a été traduite de manière quasi littérale par une équipe de chirurgiens de l’hôpital des Enfants de Boston. La chirurgie à cœur battant est tenue pour être une opération complexe, si complexe que les chirurgiens sont assistés par une batterie d’appareils et procédés (localisation par rayons x ou ultrasons, couplé à des manettes) pour guider leur cathéter, long tube fin, qui évolue dans l’organe à opérer. Dans une étude publiée dans le Journal of Science Robotics, des chercheurs ont annoncé avoir opéré avec succès les cœurs de cinq porcs grâce à un cathéter autonome.
Ce cathéter a été doté de capteurs haptiques – augmentés par un système d’intelligence artificielle – et une caméra, qui font office d’antennes. Certains insectes comme le cafard se repèrent et évoluent dans l’espace grâce à leurs antennes et le toucher. Le cathéter « sait » ainsi s’il touche du sang, une paroi coronaire ou une valve. Quand le cathéter repère une fuite, le chirurgien prend alors la relève.
Le robot, meilleur ami du chirurgien depuis 85
Le chirurgien assisté par un robot est une association qui ne date pas tout à fait d’hier. C’est dans les années 80 à Long Beach en Californie que le robot fait sa première apparition dans les blocs opératoires. Nous sommes en 1985, le Puma 260 est un robot, un bras robotique pensé pour évoluer dans l’industrie. Dans cet hôpital californien, l’appareil est utilisé pour placer une aiguille lors d’une biopsie du cerveau. Une première. Un an plus tard, le robot Scara fait son incursion dans la chirurgie orthopédique et supplée le chirurgien dans la pose de prothèses de hanches. Le Probot, en 1988, aide à exécuter un acte chirurgical de la prostate. Plus de 30 ans que le robot squatte les salles opératoires. Pour l’instant, il assiste le chirurgien. La main humaine commande, la machine exécute. Et elle exécute des tâches qui étaient jusqu’alors impossibles au chirurgien.
En février 2018, à l’institut de Gustave Roussy à Villejuif, des chirurgiens ont pu réaliser l’ablation d’une tumeur localisée dans le rhinopharynx d’un homme. La tumeur est considérée difficile d’accès et son ablation aurait pu être traumatisante. D’ordinaire, les chirurgiens auraient dû ouvrir le visage en deux pour enlever la peau et les os avant d’accéder au rhinopharynx, qui est situé derrière le nez. Une technique dont les séquelles sont lourdes. Lors de la chirurgie robot-assistée, les médecins ont attaqué la tumeur par le nez avec une endoscopie et par la bouche avec le robot Da Vinci : « Le robot permet également de mieux voir dans la zone opératoire avec la caméra 3D. C’est typiquement le genre de tumeur qui auparavant soit ne pouvait pas être opérée du fait de sa localisation soit pouvait l’être mais au prix de lourdes séquelles esthétiques et fonctionnelles pour les patients », déclare le Dr Antoine Moya-Plana, chirurgien ORL à Gustave Roussy.
Après l’assistant-chirurgien, le robot-chirurgien
Mais l’avancée annoncée par l’équipe de l’Hôpital des Enfants de Boston, à savoir le cathéter autonome, va encore plus loin : elle suggère que certains actes chirurgicaux pourraient à terme être réalisés par la main seule du robot.
« La bonne manière d’y penser, c’est de comparer le chirurgien et le robot à un pilote et un avion de chasse »
« Le cathéter évolue à temps quasi égal (ndlr, comparé à une navigation humaine), ce qui est plutôt impressionnant, compte tenu que vous êtes à l’intérieur d’un cœur gorgé de sang, qu’il faut opérer au millimètre près », explique Pierre Dupont, bioingénieur et directeur de recherche du projet. D’après lui, à terme, on pourrait imaginer le robot s’occuper d’opérations de routine. Le chirurgien aurait ainsi plus de temps et d’énergie pour intervenir si besoin, mais surtout pour se concentrer sur les tâches plus complexes.
« La bonne manière d’y penser, c’est de comparer [chirurgien et robot] à un pilote et un avion de chasse. (…) L’avion de chasse gère les tâches de routine comme faire voler l’avion. Le pilote se concentre sur les tâches nobles de sa mission », complète-t-il.
Tout patient pourrait avoir droit au même niveau d’excellence. Aujourd’hui, qui paie cher a droit à un bon chirurgien
Et l’autonomie des robots aurait une autre vertu, étaye-t-il : tout patient pourrait avoir droit au même niveau d’excellence. Aujourd’hui, qui paie cher a droit à un bon chirurgien. L’incursion des machines dans le geste chirurgical pourrait mettre tout le monde au même niveau : « Chaque médecin opérera avec les mêmes atouts et outils que les meilleurs d’entre eux ».
Reste à savoir si l’idée d’un objet évoluant dans le corps de façon autonome séduise les patients malades, même pour des opérations de routine. « Il faudra des décennies avant que les voitures autonomes ne sillonnent les routes – et même dans ce cas, elles ne pourront pas, dans certaines conditions, se conduire seules », confiait John Krafcik, le patron de Waymo, la filiale de Google consacrée à l’étude des voitures autonomes. Alors, une voiture autonome dans le corps ? L’assistant-robot chirurgien a encore de beaux jours devant lui.